Fabrice Caravaca
Nació en Périgueux, Francia, en 1977. Vive en Limoges, donde dirige la editorial de poesía Dernier Télégramme. Ha publicado una decena de libros de poesía, entre ellos, Desmembramiento de no sé qué colorido (2007), El pulpo (2010), Un cuerpo contra la tierra (2010), Somos cosmos (2012), El acantilado (2014), Las vacas bailan (2017) y Mi nombre (2017). La vida (2010) es su primer libro traducido al español (2021).
Poemas de Fabrice Caravaca
Del libro La vie / La vida
Nous sommes du parti de l’accolade. Nous pouvons le répéter encore et encore. Nous nous serrons les uns les autres dans nos bras lorsque nous nous reconnaissons. Nous chantons nos corps retrouvés. Nous célébrons la vie dans nos baisers et nous la célébrons encore dans chacun de nos membres. Nous vivons nos corps pleinement. C’est par eux que le monde prend possession de nous et nous rappelle à la terre notre mère. Un frisson nous envahit et parcourt nos peaux de la plante de nos pieds au sommet de nos crânes. Un vent se lève qui veut laisser place libre à nos joies. Qu’elles soient communicatives. Nos joies malgré le désastre contre lequel nous luttons sont la preuve de notre endurance et de notre implacable volonté. Nous vivons au cœur du désastre mais nous refusons la débâcle. Nous sommes toute une flotte, toute une armée sans haine qui s’avance pour bouleverser le monde. Notre mouvement bien que parfois en désordre est unique et inévitable. Nos corps sont toujours en mouvement et ouverts au monde. Nos corps parce qu’ils se meuvent sans cesse sont vivants. Nos corps sont une pensée vivante qui circule.
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Pertenecemos al partido del abrazo. Podemos repetirlo una y otra vez. Nos abrazamos cuando nos reconocemos. Cantamos nuestros cuerpos reencontrados. Celebramos la vida con nuestros besos y la celebramos además en cada uno de nuestros miembros. Vivimos plenamente nuestros cuerpos. A través de ellos el mundo toma posesión de nosotros y nos hace volver a la tierra nuestra madre. Un estremecimiento nos invade y recorre nuestras pieles desde la planta de nuestros pies a la cima de nuestros cráneos. Se levanta un viento que quiere dejar espacio libre a nuestras alegrías. Que sean comunicativas. Nuestras alegrías, pese al desastre contra el que luchamos, son prueba de nuestra resistencia y de nuestra implacable voluntad. Vivimos en el corazón del desastre pero rechazamos el hundimiento. Somos toda una flota, todo un ejército sin odio que avanza para transformar el mundo. Nuestro movimiento, aunque a veces es desordenado, es único e inevitable. Nuestros cuerpos están siempre en movimiento y abiertos al mundo. Nuestros cuerpos están vivos porque se mueven sin cesar. Nuestros cuerpos son un pensamiento vivo que circula.
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Nous ne nous arrêterons pas. Nous sentons que le moment est venu. Nous sentons que les indécis vont bientôt devoir prendre parti. Des confins du monde, de toutes les aurores et de tous les crépuscules crépitera une même lumière rouge orangé. La lune nous accompagnera. Et le rythme des marées saura toujours nous apaiser. Tous les mots seront retrouvés et nous en inventerons de nouveaux. Peut-être commencerons-nous par réinvestir la grande Tour. Ou peut-être vivrons-nous un temps en de nouveaux jardins suspendus. Nous avons tant de projets et d’envies. Nous les réaliserons tous. Le temps est de notre côté.
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No nos detendremos. Sentimos que llegó la hora. Sentimos que los indecisos tendrán que tomar partido pronto. Desde todos los confines del mundo, desde todas las auroras y todos los crepúsculos crepitará la misma luminosidad anaranjada. Nos acompañará la luna. Y nos calmará el ritmo de las mareas. Se descubrirán todas las palabras e inventaremos nuevas. Tal vez comenzaremos por sitiar la Gran Torre. O tal vez viviremos un tiempo en nuevos jardines suspendidos. Tenemos tantos proyectos y deseos. Los realizaremos todos. El tiempo está de nuestro lado.
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Nos morts participent de notre mouvement. Ils nous accompagnent. Ils sont avec nous. C’est aussi avec eux que nous avançons. Nous allons sortir des ténèbres. Nous vivons avec nos morts et nous les respectons. Nous nous sentons plus forts à chaque pas parce que nous savons que nous ne sommes pas seuls. Nous sommes au cœur du monde. Nous sommes au cœur des choses. Nous sommes d’une autre époque. Nous sommes sous le signe des chiens. Nous sommes corbeaux. Nous vivons en paix avec nos morts. Le soir descend sur nous comme un cortège et un voile nous enveloppe comme cocon pour que nous passions la nuit au creux du souvenir et dans l’espérance du jour à venir. Nous sommes protégés de la gangrène et des maladies. Nous connaissons tous les remèdes. Nous savons que notre corps n’est rien ou bien une pensée pour vivre dans ce monde. Une image pour que nous chérissions les miroirs. Mais nous voyons au-delà. Les miroirs non plus ne pourront plus nous voler notre âme. Nous volons. Nous connaissons le corps du corps. Et le cœur de la forêt. Nous n’avons plus besoin de cartes. Nous connaissons le monde au corps de l’autre. Nous sommes frères de la pierre et sommes faits de chair et de terre. Nous sommes le monde. Et le monde est beauté.
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Nuestros muertos participan en nuestro movimiento. Están con nosotros. Y con ellos también avanzamos. Saldremos de las tinieblas. Vivimos con nuestros muertos y los respetamos. Paso a paso nos sentimos más fuertes porque sabemos que no estamos solos. Estamos en el corazón del mundo. Estamos en el corazón de las cosas. Somos de otra época. Estamos bajo el signo de los perros. Somos cuervos. Vivimos en paz con nuestros muertos. La noche desciende sobre nosotros como un cortejo y un velo nos envuelve como un capullo para que podamos pasar la noche en la concavidad del recuerdo y en la esperanza de los días venideros. Estamos protegidos de la gangrena y de las enfermedades. Conocemos todos los remedios. Sabemos que nuestro cuerpo no es nada o tal vez un pensamiento para vivir en este mundo. Una imagen para que amemos los espejos. Pero nosotros vemos más allá. Los espejos tampoco podrán robar nuestra alma. Volamos. Nosotros conocemos el cuerpo del cuerpo. Y el cuerpo del bosque. No necesitamos mapas. Conocemos el mundo en el cuerpo del otro. Somos hermanos de la piedra y estamos hechos de carne y de tierra. Somos el mundo. Y el mundo es belleza.
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Nos pas, au petit matin, laissent des empreintes de silence sur le sol. Et pourtant partout nous sentons que nous faisons trembler la terre. Nous la faisons respirer. Elle tremble de bonheur. Nous faisons respirer la terre au rythme de nos pas, au rythme aussi de nos danses. Au rythme de nos cœurs. La terre est dans la palpitation de nos corps en mouvement. Nous aussi nous sentons que nous commençons de trembler de joie. Nous n’avons pas peur. Nous marchons parce que nous sommes sûrs de nous. Nous sommes jeunes et vivants et nous avons le cœur pur. Nous marchons et nous dansons. Et nous volons de rêves en rêves. Nous traversons le monde et commençons de le transformer grâce à nos rêves éveillés et à notre volonté sans faille.
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Nuestros pasos al alba dejan huellas de silencio en el suelo. Y sin embargo sentimos que hacemos temblar la tierra. La hacemos respirar. Tiembla de felicidad. Hacemos respirar la tierra al ritmo de nuestros pasos, al ritmo de nuestras danzas. Al ritmo de nuestros corazones. La tierra está en la palpitación de nuestros cuerpos en movimiento. Nosotros también sentimos que comenzamos a temblar de júbilo. No tenemos miedo. Caminamos porque estamos seguros de nosotros. Somos jóvenes y estamos vivos y tenemos puro el corazón. Caminamos y bailamos. Y volamos de sueños en sueños. Cruzamos el mundo y comenzamos a transformarlo gracias a nuestros sueños despiertos y a nuestra voluntad sin falla.
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Nous n’avons peut-être rien gagné. Mais il y a de l’élégance dans nos mouvements. Nos battements d’ailes : ce n’est pas rien. Notre fraternité avec les corbeaux et l’ensemble des oiseaux : ce n’est pas rien. Le soleil sur notre peau : nous savons l’apprécier et prendre cela comme un pur instant d’infini. On nous empêche de parler. Nous communiquons avec les éléments. On se moque de nous. Notre rire peut sauver l’homme. Nous avançons dans des contrées solidaires. Nos mains savent se toucher et prendre plaisir à la caresse. Nous sommes pensées et corps. Nous sommes jouissance et nous partageons autant que possible l’orgasme. Nous n’avons pas à demander pardon. Et nous n’avons pas à être enfermés. Nous pouvons courir et voler dans ce monde et dans tous les mondes possibles. Nous ne souhaitons pas être violents. Nous voulons vivre sans que la colère s’empare de nous et nous rende furieux. Nous sommes emplis d’énergie. Cela suffit pour les accolades et le partage.
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Tal vez no ganamos nada. Pero hay elegancia en nuestros movimientos. Nuestras alas en movimiento: no es poco. Nuestra fraternidad con los cuervos y todos los pájaros: no es poco. El sol sobre nuestra piel: sabemos apreciarlo y considerarlo como un puro instante de infinito. Se nos impide hablar. Nos comunicamos con los elementos. Se burlan de nosotros. Nuestra risa puede salvar al hombre. Avanzamos por lugares solitarios. Nuestras manos saben tocarse y gozar con la caricia. Somos pensamientos y cuerpos. Somos gozo y compartimos el orgasmo cuando sea posible. No tenemos que pedir perdón. No debemos estar encerrados. Podemos correr y volar en este mundo y en todos los mundos posibles. No queremos ser violentos. Queremos vivir sin que la ira nos posea y nos enardezca. Estamos llenos de energía. Es suficiente para abrazarse y compartir.
Traducción al español de Eduardo García Aguilar.